Saint-Pol : l’ancienne collaboratrice de Maurice Louf victime collatérale d’un imbroglio administratif

« Je suis totalement démunie. Pôle Emploi a rejeté mon dossier et je ne peux toujours pas toucher mes allocations chômage. Ce n’est pas normal, j’ai travaillé, j’ai une fiche de paie, il n’y a pas de raison pour que je ne sois pas indemnisée », estime l’ancienne collaboratrice de Maurice Louf*. Le 9 juillet dernier, alors qu’elle était toujours en poste à la mairie de Saint-Pol, elle a vu le nouveau maire Benoît Demagny débarquer dans son bureau, accompagné d’un huissier, pour lui signifier qu’elle devait quitter son bureau et rentrer chez elle : sa titularisation, après dix ans de service, venait d’être annulée par le maire.

« J’ai reçu un courrier recommandé dans lequel Benoît Demagny reconnaît que j’ai travaillé entre le 29 mai et le 9 juillet, que j’ai effectué des tâches administratives. »

Ancienne collaboratrice de Maurice Louf

Sur le fond de l’affaire, Benoît Demagny a saisi le tribunal administratif puisque la délibération du 2 juillet 2019, sur laquelle s’appuyait Maurice Louf pour créer ce poste, n’avait pas été votée en conseil municipal. L’ancien maire reconnaît d’ailleurs l’illégalité de cette délibération et son successeur a fait retirer les deux arrêtés municipaux créant effectivement le poste d’adjoint administratif. Le tribunal administratif de Lille lui a donné raison le 29 juillet dernier (lire ci-dessous). La création de poste était donc entachée d’illégalité et l’ancienne collaboratrice du maire occupait un poste qui n’avait pas à être créé. Sauf que cette dernière a effectivement travaillé jusqu’au 9 juillet : elle a d’ailleurs reçu une fiche de paie pour le mois de juin. « J’ai reçu un courrier recommandé dans lequel Benoît Demagny reconnaît que j’ai travaillé entre le 29 mai (NDR : date de prise de fonction du nouveau maire) et le 9 juillet, que j’ai effectué des tâches administratives. Mais il ne parle plus de salaire mais d’indemnisation pour service fait à partir du 29 mai », explique l’ancienne collaboratrice, qui attend toujours son solde de tout compte, sa fiche de paie et son salaire (ou indemnisation) pour le mois de juillet. Sans cela, Pôle Emploi ne peut calculer ses droits et lancer le versement de ses allocations : si son précédent contrat a pris fin le 28 mai, elle a effectivement continué à travaillé jusque début juillet.

Le syndicat SUD a distribué des tracts au marché de Saint-Pol et rencontré l’ancien maire, Maurice Louf.

« Je n’ai pas à rembourser ce que j’ai perçu pour mon travail. »

Ancienne collaboratrice de Maurice Louf

Benoît Demagny a par ailleurs annoncé qu’il ne demanderait pas le remboursement des sommes perçues au titre du mois de mai : « Je n’ai pas à rembourser ce que j’ai perçu pour mon travail », confie l’ancienne collaboratrice qui s’est rapprochée de SUD Collectivités territoriales. Le syndicat s’est mobilisé tout d’abord pour dénoncer la façon dont elle a été mise à la porte et s’efforce désormais d’obtenir les documents nécessaires au déblocage de la situation au niveau de Pôle Emploi. Victime collatérale d’un imbroglio administratif, l’ancienne collaboratrice se retrouve désormais sans ressources et sans savoir quand sa situation sera débloquée : « Je demande simplement mon salaire, ma fiche de paie jusqu’au 9 juillet et mon attestation employeur. Je suis dans le flou total, même le syndicat SUD n’a jamais vu une telle situation. »

* : nous avons choisi de ne pas divulguer son nom, car ça n’apporterait rien au sujet et pourrait compliquer sa recherche d’emploi.


Quelques précisions sur le fond de l’affaire et le jugement du tribunal administratif

Le tribunal administratif de Lille a été saisi par le préfet du Pas-de-Calais pour demander « la suspension de l’exécution de la délibération du 2 juillet 2019 […] relative à la modification du tableau des emplois […] et des arrêtés du maire de cette commune en date des 9 et 30 mars 2019 ». Le préfet estime que « la délibération attaquée a le caractère d’un acte inexistant ; elle ne prévoit pas au budget des crédits nécessités par la création du poste en cause ; les arrêtés contestés sont nuls et de nul effet en l’absence de toute création de poste ; ils sont dépourvus de base légale ; ils sont entachés d’incompétence dès lors que leur signataire ne disposait pas d’une habilitation pour signer au nom du maire un arrêté de nomination d’un agent ». Concernant les deux arrêtés en question, le maire de Saint-Pol les ayant annulés par un nouvel arrêté le 9 juillet, « les conclusions tendant à la suspension de ces actes sont dépourvues d’objet ». En revanche, « l’exécution de la délibération du 2 juillet 2019 […] est suspendue jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur sa légalité ». En clair, le tribunal administratif estime que la légalité de la délibération est sujette à caution et doit être vérifiée. Pour les arrêtés municipaux, puisqu’ils ont été annulés, il n’est pas nécessaire – ni même possible – de les suspendre.

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