Suite à des plaintes liées au bruit, le circuit de Croix a imposé des contrôles draconiens

– Vous êtes à 105 décibels, au lieu des 102. Ça ne va pas être possible.
– Attendez, on va réessayer…
Le motard relance sa machine et se cale pile poil à 5 000 tours/minute, surtout pas au-dessus, sous le contrôle du commissaire de la Fédération française de motocyclisme :
– Toujours 105 décibels.
Le pilote maugrée et repart tripatouiller son engin afin de réduire le bruit généré par son pot d’échappement. Derrière lui, d’autres attendent fébrilement leur contrôle, espérant se maintenir sous la barre des 102 décibels. La plupart sont validés, mais plusieurs recalés et certains ne pourront participer à la série des ProTwin, les motos les plus puissantes programmées pour cette Week-end Race Cup – WERC. « Ils ont dû travailler tard hier soir pour réduire à ce niveau », sourit un commissaire de la FFM.

« Vendredi soir, j’étais prêt à annuler la série des ProTwin si les pilotes ne respectaient pas les seuils. Le maire de Gauchin-Verloingt a eu raison de nous mettre la pression. »

Patrick d’Aubreby, propriétaire du circuit de Croix-en-Ternois

En effet, depuis deux jours, le bruit généré par les machines a engendré nombre de crispations. Jeudi matin, le maire de Gauchin-Verloingt a protesté auprès du circuit de Croix-en-Ternois : « Je suis rentré de déplacement jeudi et le bruit était nettement plus important que d’habitude. J’ai décidé de réagir car une personne m’en a parlé et j’ai pu le constater par moi-même. » Jean-Jacques Hochart a envoyé un courriel au circuit de Croix, en mettant en copie d’autres maires du secteur ainsi que le responsable de la préfecture en charge de l’homologation du circuit. Le propriétaire du site, Patrick d’Aubreby, n’a pas pris la réclamation à la légère et a aussitôt demandé à la FFM de renforcer les contrôles : « Vendredi soir, j’étais prêt à annuler la série des ProTwin si les pilotes ne respectaient pas les seuils. Le maire de Gauchin-Verloingt a eu raison de nous mettre la pression : si on ne fait pas ces contrôles, on aura des problèmes, mieux vaut anticiper. Ce samedi matin, c’était un peu la panique. On nous dit qu’on est très draconiens, mais on se doit de maintenir une bonne entente avec nos voisins. » Les discussions avec les pilotes sont même montées dans les tours, certains menaçant de bloquer l’événement, puis les esprits se sont apaisés et les motards ont bidouillé leurs machines afin de respecter les seuils, notamment grâce à de la laine de verre installée dans le pot d’échappement pour réduire la résonance.

Certains pilotes se montraient passablement agacés (d’autant que certains ont traversé toute la France ou sont venus de l’étranger pour participer), mais l’organisateur du WERC a fait preuve de pédagogie : « Pour les motards, le bruit est synonyme de puissance, ça les met en condition, ça participe à l’atmosphère de l’événement. Mais il faut reconnaître que c’est un problème. Je suis contre le bruit qui ne sert à rien, mais aussi contre les extrêmes qui voudraient qu’on ne puisse plus rouler. La FFM impose une norme de 102 décibels, auparavant nous étions à 105. On progresse, on tanne les pilotes pour qu’ils fassent des efforts, mais c’est une question de bonne volonté. Si on constate qu’un motard réussit à réduire significativement le bruit de sa machine, on peut le laisser rouler, même s’il dépasse un petit peu le seuil. En revanche, ceux qui n’essaient même pas, on leur interdit l’accès à la piste. C’est dans l’intérêt de tout le monde, mais c’est une problématique difficile à gérer. On doit trouver un bon équilibre entre l’activité économique et les nuisances. Les pilotes n’ont aucun intérêt à voir le circuit fermé à cause du bruit, comme c’est arrivé à Albi. » Marc Mothré était d’ailleurs ravi de pouvoir revenir sur le circuit de Croix pour organiser l’une des cinq épreuves de la WERC : il n’était pas venu depuis quatorze ans, mais un autre circuit ne pouvant plus l’accueillir, le circuit de Croix a offert une précieuse alternative aux quelques cent soixante dix pilotes engagés. « Finalement, ça se passe bien, conclut l’organisateur. On reviendra, mais on aimerait bien qu’ils agrandissent un peu, ce qui nous permettra d’engager plus de pilotes : nous ne pouvons en avoir que vingt-six en course ici, contre trente-six en moyenne sur d’autres pistes. » Le projet d’agrandissement est toujours à l’ordre du jour et devrait s’accompagner d’aménagement pour réduire les nuisances sonores. En attendant, l’application à la lettre des seuils a finalement permis à l’événement de se tenir sans que la plupart des habitants des villages voisins s’en rendent compte.


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