Dans un garage de la rue de Canteraine, François Barbe et Théo Vion apportent les dernières finitions au Binbin qui sera immolé par le feu samedi soir. Les deux jeunes majeurs tiennent à garder la surprise et cachent leur création sous un drap, en attendant de la dévoiler lors du défilé : « On avait envie de toute refaire à neuf, mais le Binbin, c’était notre principal objectif. Pour l’instant, seuls nos pères l’ont vu. Cette année, il va être grand, très grand ! » Dès la fin du carnaval, au mois de mars, les deux Pères la Joie se sont attelés, avec quelques camarades, à restaurer tout le matériel du groupe folklorique pour donner un coup de jeune à l’association fondée en 1922 et relancée en 1952 – la guerre ayant suspendu la joie quelques années. « On a démonté, repeint et restauré le moulin qui en avait vraiment besoin. On a réparé les peaux de grosses caisses. On a aussi refait les têtes de Pif et Paf », détaille François qui explique que les deux géants avaient un gros nez, alors que Pif est censé en avoir un long. Soucieux des détails, il a même demandé à l’artiste Domé de corriger sa fresque réalisée cet été, rue d’Hesdin, pour que les pifs des géants soient les bons.
« On a grandi là-dedans, on ne pourrait plus faire sans les Pères la Joie »
Théo et François ont tous deux dix-huit ans et sont Pères la Joie depuis presque autant d’années : « On était encore dans nos poussettes qu’on allait au défilé. On avait déjà notre rouillère », sourit Théo en montrant des photos de lui en tenue traditionnelle, au début de ce siècle. « On a grandi là-dedans, on ne pourrait plus faire sans les Pères la Joie. On s’amuse bien, on passe de bons moments, on visite plein de villes. C’est vrai que ça se perd un peu, ça se voit. On essaie de tout faire pour attirer des nouveaux, mais la mentalité a évolué. Les jeunes ont peut-être peur d’être ridicules », analyse François qui relativise : « Le ridicule ne tue pas, sinon je serais mort depuis longtemps avec le carnaval et tout le reste ! » Il est tellement impliqué dans le groupe folkorique que sa chambre est devenue un musée dédié aux Pères la Joie et au carnaval, avec costumes, coupures de presse et instruments divers. François a même motivé son père, Hervé dit « Vévé », à renfiler la rouillère qu’il avait raccrochée depuis quelques années. Le paternel de Théo n’a jamais arrêté. Il est même chef de groupe et défile en tête de cortège, bâton en main : « Mon arrière-grand-père était déjà Père la Joie ! » Aujourd’hui, ils sont encore une bonne trentaine à partir cinq ou six fois par an pour défiler dans différentes villes, chanter et danser Saint-Pol. Le doyen, « la Cuche », dépasse les quatre-vingts ans, les plus jeunes en ont huit fois moins. François et Théo représentent l’avenir du groupe folklorique et ont conscience qu’ils sont les Pères la Joie de demain : « On a toujours vécu à Saint-Pol. On est bien ici et on est fiers d’être Pères la Joie. Si on part, qui va prendre notre place ? »
Départ du défilé de la ducasse samedi à 21h, boulevard Carnot.