Les Petites Victoires : l’hymne à nos campagnes

« Il n’y a plus de bistrot, plus de coiffeur, plus de docteur… » La désertification touche le village de Kerguen, comme tant d’autres en Bretagne et en France. Même l’école, qui ne compte qu’une seule classe, est menacée, malgré les efforts de l’institutrice qui se donne corps et âme pour sa commune et ses administrés : Alice est le maire. Elle porte sa commune sur ses épaules, tout comme Julia Piaton porte le film Les Petites Victoires : avec une éblouissante énergie et une générosité sans faille.

Elle donne la réplique à Michel Blanc, qui tient le rôle d’Émile, un retraité illettré bourru qui se décide à retourner sur les bancs de l’école communale. Le duo est complété par une galerie de portraits d’habitants qui maintiennent la vie dans la commune. Autant de personnages et d’histoires inspirés de la réalité de villages de Bretagne que la réalisatrice Mélanie Auffret a visités – près de quatre-vingt : « C’est un concentré d’histoire que j’ai pu récolter durant mes trois années d’écriture. Les personnages ne sont pas du tout imaginaires, ils existent dans nos villages. J’avais lu un article sur un maire qui avait inscrit des moutons dans son école pour la sauver. J’ai fait un travail d’investigation, comme un journaliste, j’ai rempli cinq carnets d’anecdotes et d’histoires. Deux sujets sont apparus très vite. D’abord, celui du rôle des maires de petites communes. Neuf d’entre eux m’ont raconté leur histoire. Ce sont des héros du quotidien, ils sont à la fois techniciens de voirie, électricien, sexologue même… Et il y avait aussi le sujet de l’illettrisme, qui touche 7 % de la population. »

Inspiré de faits réels, aussi saugrenus puissent-ils paraître, le film raconte la vie au village avec tendresse. C’est d’ailleurs ce titre de Bourvil qui clôt le film. C’est également avec une grande tendresse pour ces petites communes que Mélanie Auffret a raconté aux spectateurs du Régency son aventure humaine, riche en anecdotes depuis le casting des enfants à l’installation dans le village de Le Juch qui a servi de décor. D’ailleurs, pour preuve que la réalisatrice a touché juste, le film a permis de faire revivre la bourgade : « Dans ce village, il y avait auparavant onze bistrots, deux boulangeries, deux boucheries… Aujourd’hui, il n’y a plus rien. Le bâtiment qui sert de mairie dans le film était abandonné depuis vingt-cinq ans. Durant le tournage, il y a eu un tel buzz que des habitants du coin venaient pensant qu’un bar-tabac avait ouvert ! Et finalement, le bâtiment a été racheté pour y ouvrir un bar. C’est un peu une petite victoire ! » Mélanie Auffret traite avec légèreté de difficultés bien réelles dans les petites communes et affirme avoir « voulu faire un film très optimiste », même si la conclusion – pourtant très joyeuse – ne se fait pas d’illusion. La réalisatrice témoigne d’une forme de solastalgie – voire de saoulastalgie quand les habitants trinquent dans leur éphémère bistrot retrouvé. Si la vie des villages d’avant ne reviendra sans doute jamais, les habitants sont toujours là : « Ce qui compte, c’est de faire des choses ensemble. L’important est d’entretenir les liens entre nous. »

Les Petites Victoires, au cinéma le 1er mars 2023

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