Le village martyr de Siracourt honore victimes et héros de la Seconde Guerre Mondiale

Comme l’a résumé le sous-préfet du Pas-de-Calais, Jean Richert : « Ce sont deux histoires gravées dans l’Histoire, parmi tant d’autres » qui ont été honorées dimanche matin à Siracourt. Le village martyr de la Seconde Guerre Mondiale, alors quasiment totalement rasé par les bombardements alliés, a rendu hommage aux victimes du conflit en dévoilant trois stèles érigées au centre du bourg. La première représente la Croix de Guerre décernée à la commune et  salue la mémoire de deux figures locales ; la deuxième rend hommage aux habitants de Siracourt décédés lors des conflits mondiaux et aux victimes des bombardements ; la troisième aux quarante-trois aviateurs tués au cours des missions vers Siracourt, notamment à l’équipage du B-24 Liberator “Jackass Male”. Ce bombardier s’est écrasé le 1er avril 1944 à proximité du village, en revenant d’un raid aérien sur l’Allemagne. Sur les onze membres d’équipage, huit sont décédés, deux ont été faits prisonniers et le dernier a réussi à s’échapper. L’un des prisonniers était George C. Agee Jr, originaire de Pennsylvanie, qui a pu regagner les États-Unis après la guerre, où il est décédé en 2001. Deux de ses fils étaient à Siracourt dimanche pour participer l’hommage rendu à leur père : « C’est un grand honneur que vous rendez à tous les aviateurs américains, anglais, canadiens et autres. C’est un acte noble que vous faites ici », a salué Steven Agee, qui a contribué financièrement à l’érection des stèles.

La cérémonie a également honoré la mémoire du résistant Jules Lallau. Né à Sains-en-Gohelle, il est installé avec sa famille à Acq lorsqu’il rejoint le réseau Samson. Averti des agissements des Allemands sur la commune de Siracourt, il se fait embaucher dans la ferme Mallet, ce qui lui permet de surveiller l’avancée du chantier de construction du blockhaus et d’en informer les alliés, corroborant depuis le sol les observations aériennes. Arrêté puis déporté dans le train de Loos le 1er septembre 1944, il passera par les camps de Sachsenhausen, Ravensbrück et finalement Bergen-Belsen où il disparaîtra sans laisser de traces. Sa petite-fille, Maryse, est venue depuis le sud de la France pour rendre hommage à son grand-père, dont le parcours était demeuré un mystère jusqu’en 2008, date à laquelle les recherches de son fils, Max, lui ont permis d’enfin connaître son tragique destin.

La cérémonie de dimanche a permis de rendre hommage aux victimes de la guerre, mais aussi d’entretenir la mémoire en racontant comment Siracourt a été la commune la plus bombardée de la Seconde Guerre Mondiale, avec près de 5 500 tonnes de bombes déversées pour tenter de détruire le blockhaus de 240 mètres de long et 40 mètres de large destiné à l’assemblage et au lancement de missiles V1. Cette construction a mobilisé jusqu’à 1 500 prisonniers soviétiques, notamment Ukrainiens, installés dans des camps à Ramecourt et Croix-en-Ternois. Les bombardements ont débuté le 30 janvier 1944 et se sont poursuivis jusqu’au 6 juillet, avec une trentaine de raids aériens qui ont transformé le village en un paysage lunaire. Aucun des quelque 130 Siracourtois d’alors n’est mort durant le conflit. D’ailleurs, jusqu’à l’évacuation du village avant le début des raids aériens, « la vie du village continue, comme si de rien n’était », rapporte le maire actuel. André Genelle a lancé une opération de recueil des témoignages des anciens, avant que ceux-ci ne disparaissent avec leurs souvenirs, ce qui a permis de reconstituer une partie de l’histoire durant l’occupation, avec quelques anecdotes : « Le garde allemand était plus souvent au bistrot du village qu’à sa barrière. » C’est cette « volonté de se réapproprier notre histoire commune et de la partager » qui a motivé l’installation des stèles mémorielles, un parcours historique de neuf panneaux à travers le village, ainsi que l’exposition sur la Royal Air Force proposée à la salle communale jusqu’au 2 avril, prêtée par la Coupole d’Helfaut, et complétée par des photographies du village. En racontant l’histoire de la commune, du résistant Jules Lallau ou de l’aviateur George Agee, Siracourt propose de toucher au plus près la réalité d’un conflit qui a changé la face du monde, pour ne jamais oublier.

Découvrir l’histoire du résistant Jules Lallau sur le site internet de sa petite-fille : http://juleslallau.canalblog.com/



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