Les jeunes sont-ils plus concernés que leurs aînés par les questions écologiques ? Au lycée Châtelet (reconnu écolycée depuis cinq ans), une douzaine d’élèves se sont mobilisés pour organiser une série d’échanges et de démonstrations sur l’écologie au quotidien : « On a dû rater au moins huit heures de cours pour tout préparer, mais il faut qu’on s’investisse si on veut changer les mentalités à notre échelle », estiment ces lycéens militants. Tous les élèves étaient libres de venir durant leurs cours, certains professeurs ont emmené toute leur classe, pourtant les adultes de demain ne se sont pas pressés pour évoquer leur futur et les solutions pour le préserver dès aujourd’hui : « Les élèves de terminales étaient juste une dizaine. On ne sait pas comment faire pour attirer les gens, on a un gros problème de communication. Pourtant, on a mis des affiches partout, on en a parlé aux professeurs. Certains ne sont pas prêts à changer, ils disent qu’ils comprennent le message mais ils restent passifs. D’autres n’ont même pas conscience qu’ils sont concernés. Et clairement, il y en a qui s’en foutent », constate Eva, intimement convaincue que sa cause est juste et nécessaire. Pourtant, deux journées avaient déjà été organisées au printemps et ont convaincu quelques élèves, comme Jules et Florian qui sont passés du côté des militants : « L’an dernier, les débats nous avaient permis de prendre conscience que c’est à nous de changer, qu’il ne faut pas attendre les adultes. Ces débats ont été l’élément déclencheur. »
« On n’est pas là pour faire la morale, on ne veut rien imposer. »
Les discours de leur camarade suédoise Greta Thunberg ont trouvé un écho chez ces deux lycéens qui découvrent depuis quelques mois l’urgence climatique, mais aussi comment ils peuvent essayer de sauver le monde : « On peut faire beaucoup de choses dans la vie quotidienne, ne serait-ce qu’en développant le tri, le recyclage, le compostage. Tout le monde ne le fait pas encore. En France, on est incapables de gérer nos déchets et on les envoie à l’étranger par bateaux. On peut aussi interdire les plastiques à usage unique.. Il y a aussi le problème de la voiture, mais c’est difficile de s’en passer dans le Ternois. » Les débats et tables rondes portaient sur trois thèmes : l’environnement, le social et l’alimentation. Ce dernier thème est d’ailleurs particulièrement sensible au lycée : « On a fait un sondage auprès des élèves et la majorité serait favorable à des repas sans viande. Aujourd’hui, des menus végétariens existent à la cantine, mais ils ne sont pas mis en avant. Il faut vraiment le vouloir pour manger végé », constate Jules, approuvé par Eva : « C’est un peu compliqué parce qu’il n’y a pas d’apport de protéines. Même si on ne prend pas de viande, ça n’en réduit pas la quantité à la cantine. » Face à la pollution générée par l’élevage, Eva évoque la possibilité de l’interdire, ses camarades sont plus mesurés : « Si on force les choses, on risque de braquer les gens, il vaut mieux les sensibiliser et que ça vienne d’eux. On n’est pas là pour faire la morale, on ne veut rien imposer. » « Vu l’urgence climatique, on peut se poser la question. Si les gens veulent manger de la viande, il faudrait au moins revenir à des petits producteurs, de proximité. C’est avant tout un problème social et économique », estime Eva, qui lutte aussi contre la surconsommation.
« Si chacun agit chez lui, si on additionne les petits actes, on peut changer les choses. »
Pour prouver à ses camarades qu’ils peuvent agir au quotidien et limiter leur impact environnemental, elle a préparé un petit atelier avec divers produits d’hygiène et ménagers, de la nourriture bio, des aliments en vrac… En quelques minutes, elle expose ses recettes et solutions que chacun peut reprendre : « Je m’intéressais déjà à l’environnement, mais je ne savais pas qu’on pouvait faire autant de choses. Si chacun agit chez lui, si on additionne les petits actes, on peut changer les choses. » Les jeunes activistes ont aussi quelques idées pour que leur lycée limite encore plus son impact environnemental, comme boycotter la cantine, développer le compostage, ou encore accueillir des poules « Les poules pourraient manger les frelons et protéger les abeilles de Mme Poillion ! » Ils ont également suggéré à la direction d’utiliser le moteur de recherche Ecosia qui reverse une partie de ses bénéfices pour la reforestation, plutôt que le diablement efficace Google. « On veut proposer des choses utiles, insistent les lycéens. Avec toutes nos idées, on peut faire avancer les choses. On a déjà beaucoup parlé, maintenant on voudrait plutôt lancer des actions. » Lors de la dernière table ronde de la journée, Eva anime un échange avec une quinzaine de lycéens de seconde et ouvre les débats : « Ceux qui pensent que leurs actions peuvent changer le climat, mettez-vous à droite. Ceux qui pensent qu’ils ne peuvent rien faire, à gauche. » Un élève s’est retrouvé seul, à droite, pour porter un peu d’optimisme.