Déviation de la D939 entre Aubigny et Ligny-St-Flochel : du goudron et des plumés

Déviation ou alimentation ? « Le département a déjà fait son choix », déplore Hubert Brisset. Cet agriculteur de Berles-Monchel et quelques autres du secteur ont constitué le collectif ADN 939 et lancé, depuis quelques jours, une opération de communication : de grandes banderoles installées au bord de la départementale, des slogans clairs et le hashtag #BalanceLeGoudron. Ces agriculteurs dénoncent le choix du tracé pour la déviation qui devrait relier Aubigny-en-Artois à Ligny-Saint-Flochel. Le département a rendu les conclusions de la concertation publique début juillet et s’oriente vers un tracé de neuf kilomètres à travers les champs, plutôt qu’un aménagement de la route actuelle. « Nous nous sommes exprimés durant la concertation, mais celle-ci n’a fait que confirmer une décision connue depuis longtemps. Il est plus simple et moins cher de prendre soixante-dix hectares en plaine plutôt que de chercher à aménager l’existant », estime Hubert Brisset. L’agriculteur souligne qu’un hectare de champs permet de produire dix tonnes de blé, soit l’équivalent de vingt-cinq mille baguettes : faites-le calcul pour soixante-dix hectares. « Sur ces terres, on produit du blé, du lin, des betteraves pour le sucre, du lait avec les vaches. Les terres agricoles ne sont pas considérées à leur juste valeur. Le département a d’ailleurs signé une charte en 2010 pour économiser le foncier et le gouvernement a annoncé qu’il fallait lutter contre l’artificialisation des sols », souligne l’agriculteur. La déviation irait à l’encontre de ces préoccupations environnementales et le collectif ADN 939 veut remettre sur la table le projet d’aménagement de la route actuelle qui n’a pas été retenu : « Nous proposons d’adapter la route avec une sécurisation pour les riverains. Cette départementale, on nous dit que c’est la « route du travail » pour les habitants. Ce n’est pas à Aubigny ou à Berles-Monchel que la circulation est difficile, mais plutôt à l’entrée d’Arras. Pour les usagers, il faut mettre l’argent où c’est vraiment utile. On peut également détourner une partie du trafic des automobilistes qui se rendent à la mer. »

« Une déviation aurait des conséquences sur plus de vingt commerces »

La proposition est partagée par un autre collectif, ROD 939, qui regroupe surtout des commerçants d’Aubigny, Savy-Berlette, Berles-Monchel et Tincques. Eux aussi plaident pour un aménagement de la route actuelle car ils craignent un effondrement de leur fréquentation. « Le tracé retenu est une catastrophe économique et écologique. Sur cette route, on a des cafés et des commerces qui vivent grâce au passage sur la RD 939 », insiste Manuel Wacheux, à la tête de ce second collectif. Si le département tient absolument à faire une deux fois deux voies, il est possible d’en réaliser une entre Berles-Monchel et Tincques, en limitant l’impact pour les riverains et les commerces, sans toucher aux terres agricoles. Une déviation aurait des conséquences sur plus de vingt commerces entre Aubigny et Ligny-Saint-Flochel. » Lui-même à la tête d’une entreprise de transport, Manuel Wacheux concède que la nouvelle route lui permettrait de gagner quelques minutes dans ses livraisons, mais il s’inquiète surtout de l’impact écologique du projet. « C’est une catastrophe avec l’artificialisation des sols. Au mois de mai, on a eu trois inondations à Tincques, du jamais-vu, et ça ne va pas s’arranger avec un tel projet. Pour la faune, aucun aménagement n’a été prévu sur le tronçon entre Haute-Avesnes et Étrun, aucun passage pour les humains ou les animaux, et on ne voudrait pas d’un même projet dans la plaine. » Les chasseurs sont également mobilisés afin de proposer des aménagements au projet, quel que soit le tracé finalement retenu. Manuel Wacheux balaie également l’argument de la fluidification de la circulation : « Sur les tronçons déjà réalisés, on constate que les automobilistes sont bloqués à chaque rond-point. On peut entendre l’argument de la sécurisation des routes, mais il est possible de réaliser des aménagements pour les riverains. »

Deux pétitions lancées et une « opération coup-de-poing » en préparation

Manuel Wacheux a déjà écrit au président du département, rencontré des représentants de l’institution et attend un nouveau rendez-vous qui doit être fixé d’ici l’automne. Il se donne donc deux mois pour mobiliser les acteurs du territoire contre la déviation : « Les commerçants, les agriculteurs, la chambre de commerce, les chasseurs sont contre ce projet, tout comme la plupart des élus du secteur, même s’ils ne veulent pas se mouiller. Nous allons rencontrer les riverains individuellement pour en discuter avec eux. Nous voulons proposer un tracé qui intègre la sécurité des riverains et la desserte des commerces et acteurs locaux. Cette semaine, nous allons déposer une pétition dans tous les commerces des communes concernées. » Une pétition en ligne a déjà été lancée par ADN 939, le collectif des agriculteurs, et a récolté en deux semaines plus de six cents signatures. Manuel Wacheux et son collectif réfléchissent également à une « opération coup-de-poing » à la rentrée pour faire entendre leur désaccord : « Si on ne bouscule pas un peu les choses, on ne se fait pas entendre. » Néanmoins, pas question de brûler des pneus pour cet écologiste convaincu et père de famille : « Si je m’engage là-dedans, c’est pour défendre la ruralité et les acteurs locaux. On ne fait pas ça pour nous mais surtout pour les générations futures. »

Signez la pétition du collectif ADN 939.


Documents :

Bilan de la concertation du 2 mai au 1er juillet 2016.

Conclusion de la concertation et choix du tracé.

La page Facebook du collection ROD 939.

La page Facebook du collectif ADN 939 #Balancelegoudron.

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