Finding George Chapitre 4 : la terreur venue du ciel

Monchy-Cayeux (France), 2018/08/11, 15.12 pm

Les frères Ponchant n’avaient pas dix ans lorsque Monchy-Cayeux a été libéré de l’occupant. L’aîné, Adrien, se rappelle parfaitement du B17 écrasé dans le champ de la Vallée Blanche : « On aurait dit qu’un géant avait pris l’avion, l’avait écrabouillé et jeté au sol. Il est resté là un moment, avec la partie avant et le moteur. Si j’ai bonne mémoire, on est allé le démonter fin quarante-cinq, début quarante-six. » Adrien et sa bande ont découpé le fuselage du B17 pour le revendre à un ferrailleur d’Auchy-les-Hesdin : « Y a des sous qui se perdent ! », avait constaté l’un des jeunes Monts-Cayens. En quelques jours, les petits vautours dépecèrent la carcasse du bombardier, sans imaginer qu’un Américain viendrait à sa recherche soixante-quatorze ans plus tard. Seconde déception pour le sergent : le gamin de l’époque n’est pas un témoin direct du crash. « On a vu tomber les bombes, je m’en rappelle bien. Mais l’avion, on l’a pas vu tomber. C’est un monsieur qui est décédé et qui l’a vu. Il l’a raconté à notre grand-mère. Nous, on écoutait. »

Les deux frangins n’ont rien oublié de cette période. Leur père jouait de l’accordéon Chez Léon, où les Allemands venaient danser. L’occupant s’était installé dans tout le village, établissant son siège dans le château et casernant les soldats chez les habitants. « Chaque maison devait accorder au moins une chambre. Les chevaux étaient réquisitionnés. Ma marraine a travaillé au château pendant un an et demi. Elle a même pu compter ses trimestres pour sa retraite », rapporte Serge, le cadet. Toujours corrects, les Allemands. La terreur venait plutôt du ciel, des bombes qui pilonnaient régulièrement le village et la base de lancement de V1 cachée dans les bois, obligeant les villageois à se réfugier dans des terriers creusés sous les coteaux. Les frères Ponchant détaillent l’histoire de Monchy-Cayeux aux cinq membres de la Communauté de la Baguette. Le sergent Bornemeier a perdu son colonel mais attiré l’Abeille de la Ternoise. Désormais flanqué d’un tandem de journalistes et d’un duo chercheurs de métaux, Erik suit la paire de frangins dans les rues de Monchy-Cayeux jusqu’au stade de foot. Les frères Ponchant s’avancent sur un pont : durant la guerre, toutes les armes et munitions récupérées étaient déversées dans la rivière. Celles du B17 pourraient dormir dans le lit de la Ternoise. En revanche, nul ne sait où reposent les restes du lieutenant Wilson. « Il n’y a pas de soldat enterré au cimetière. Sauf un, de la Première Guerre. Si j’avais quatre-vingt-dix ans, je pourrais vous en dire plus, s’amuse l’octogénaire. Vous devriez peut-être demander à Annie et Marc qui habitent juste à côté du champ. » Erik Bornemeier remercie les deux mémoires du village, suit la piste tracée et sonne chez Marc et Annie, à quelques mètres du lieu du crash du B17.

Le sergent est accueilli dans sa langue maternelle par un jeune homme en chemise militaire britannique. Né à Monchy-Cayeux, Simon maîtrise deux langues étrangères : l’anglais et le coréen. Son père exploitait le champ voisin d’où il rapportait des morceaux d’avion : « Quand les agriculteurs travaillaient le sol, des morceaux remontaient. Mes parents m’ont ramené une douille de calibre cinquante de mitrailleuse, des pièces en métal avec de la peinture verte. Elles sont dans ma chambre. Jai tout mis dans une boîte à chaussures. Je n’ai pas remarqué de numéro de série, mais on peut vérifier. » Trop désordonné, Simon ne pourra retrouver sa boîte à trésors, mais sera d’une aide précieuse pour traduire les informations de son père : « Un voisin m’a dit qu’on avait comblé un trou d’obus avec un moteur d’avion. » Au bord du champ de la Vallée Blanche, l’ancien agriculteur pointe le périmètre à explorer. L’aluminium a été revendu mais pas le moteur de l’avion dont il a bien fallu se débarrasser. Son numéro de série assurerait qu’il s’agit bien du bombardier du lieutenant Wilson. Un détecteur de métaux et la bonne volonté de la Communauté de la Baguette ne suffiront pas à déterrer un moteur de B17 enfoui plusieurs mètres sous terre. Erik Bornemeier décrète la fin des recherches et donne rendez-vous à ses acolytes au lendemain matin.

Le sergent rejoint son supérieur, ragaillardi par l’annonce de l’avancée de l’enquête. Les deux Américains ont été séduits par l’accueil de la veille et invitent le Gobelin à retourner à l’Embuscade pour y partager d’énormes burgers et un match de soccer. Le sergent a joué défenseur au lycée et suit le Real Salt Lake, au contraire du colonel qui découvre le ballon rond devant Russie-Croatie : « Les Russes ont quelle couleur ? » « Rouge », répond le Gobelin. Repu de french fries et de Fraich’burger, l’Américain ricane : « Évidemment, ce sont les Rouges. »

To be continued…

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Retrouvez les épisodes précédents:
– Prologue : la piste des jeteurs de foin de Money-Cayeux
– Chapitre 1 : la French Connection

– Chapitre 2 : la Communauté de la Baguette

– Chapitre 3 : les preuves des bombes

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